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Criminalisation

Invitation au premier camp international « Au delà de l’Europe » en Chalcidique, Grèce, du 18 au 25 août

Date de publication: 
Mardi, 9 Juin, 2015
Par: 
Mouvement Anti-autoritaire de Thessalonique

Pour participer : [email protected] ou http://camp.beyondeurope.net/

Traduction en français de l'invitation du Mouvement Anti-autoritaire de Thessalonique. L’appel "Au delà de l’Europe" sera publié dans les semaines qui viennent.

Dans le nord-est de la Chalcidique, une longue lutte, qui a pris la forme d'un soulèvement de la population locale contre les forces de répression, mais aussi contre les autorités locales, a mis en avant la question du développement capitaliste, ainsi que la puissance de la résistance quand elle est exercée par les citoyens eux-mêmes.

La société minière canadienne Eldorado Gold, opérant avec la complicité scandaleuse de l'Etat grec et de la plus grande entreprise de construction grecque, Aktor, a décidé de rayer de la carte une zone de montagne de grande valeur intrinsèque avec une forêt ancienne, qui soutient les activités locales telles que l'élevage, l'apiculture et de l'agriculture, avec de belles plages pour un tourisme de faible intensité, et avec des ressources en eau abondantes. Comme prévu, leurs plans ne se limitent pas à la Chalcidique, mais s’étendent aussi à travers la Macédoine et la Thrace, où des dépôts aurifères significatifs ont été détectés. Le procédé de traitement au cyanure, utilisé par l'entreprise dans des projets miniers partout dans le monde, ne laisse aucun doute sur ce qui se passe déjà dans la région ou ce qui se passera dans l'avenir.

Ce projet pharaonique, qui va provoquer une catastrophe écologique de grande ampleur en Grèce, ne pouvait pas se poursuivre sans une répression sévère, mettant ainsi en évidence une autre industrie lourde, l'industrie de la poursuite judiciaire. Actuellement, plus de 300 résidents locaux et soutiens sont poursuivis, et beaucoup sont accusés d'infractions pénales.

Tout cela s’est développé durant les années de gouvernement du PASOK et de la Nouvelle Démocratie, qui ont fait preuve d’une attitude implacable dans la région. Mais il est apparu, il y a un an, que quelque chose pouvait changer au niveau institutionnel. D'abord avec les élections municipales en mai 2014, où le nouveau maire a été soutenu par le mouvement anti-mines, et plus tard avec les élections législatives, en janvier 2015, où Syriza, un parti qui a promis d'arrêter le projet d'exploitation minière, a reçu le plus de suffrages.

Tia Maria : Vivre, ou mourir

Date de publication: 
Mardi, 28 Avril, 2015
Par: 
RaquelN

Tia Maria[1] : Vivre, ou mourir

Après les discussions - initiées le 20 mars entre organisations, fronts de défense, population et représentants du gouvernement[2] - celles-ci n'ayant pas aboutit, les habitants de la vallée de El Tambo ont poursuivit leur grève. Le 15 avril, Jesús Cornejo, président de l’association des utilisateurs de l’eau (Junta de usuarios del valle del Tambo), a été arrêté, puis relâché quelques jours après faute de preuves ; cependant, les investigations à son encontre se poursuivront[3].

En effet, après le rejet, par le ministère de l'Énergie et des Mines (Minem), de la première étude d'impact environnemental (EIE) de 2009, en raison des 136 observations de l'UNOPS[4] ; les porteurs du projet, désirant évidemment l’imposer, ont présenté une seconde étude d'impact environnemental (EIE) en avril 2015, qui, malgré les fortes critiques, a été est très rapidement approuvée. Cette seconde EIE devait « lever les observations de l’UNOPS » et donc, particulièrement démontrer que le projet ne polluera pas les sources d'eau et que les résidus des explosions n'affecteront pas la vallée. Cette nouvelle EIE affirme donc que l'eau souterraine ne sera pas affectée, puisque le projet utilisera de l’eau de mer dessalée et que, de plus,  l’eau consommée par la vallée provient des Andes ; mais aussi que les particules issues des explosions n’atteindront pas la vallée, puisque ces dernières auront lieu en journée, moment où le vent ne tourne pas en direction de la vallée»[5]. Espérons que le vent sache lire les EIE et tournera du côté qui est écrit ! En prime, le gouvernement rejette toute consultation préalable « puisque nous ne sommes pas face à des populations indigènes reconnues dans la base de données du Ministère de l’Inter-culturalité », ministère chargé d’identifier les populations indigènes[6]. Il n’y a, dans cette vallée, que des agriculteurs… donc on ne pose aucune question et on écrase.

Changer de maître, mais pas d’école ? Opération Correa en huit leçons.

Date de publication: 
Jeudi, 23 Avril, 2015
Par: 
Collectif Aldeah

Crédit : http://www.lemandarin-magazine.com/la_chine_en_equateur_derriere_la_fraterniteCrédit : http://www.lemandarin-magazine.com/la_chine_en_equateur_derriere_la_fraterniteActuellement en salles, le film « Opération Correa » de Pierre Carles se propose de dévoiler la logique marchande des grands médias qui pousse les journalistes à ignorer le « miracle équatorien » et son principal protagoniste, Rafael Correa, président de l’Equateur depuis presque neuf ans*. De Podemos (Espagne) à Syriza (Grèce), en passant par Jean-Luc Mélenchon en France, le rêve équatorien séduit pourtant la gauche radicale européenne, et l’« opération » de Pierre Carles entend donner à cet enthousiasme un nouvel élan. Mais après ces neuf années, que peut-on dire du projet politique de Rafael Correa ? Entre le silence des grands médias et la propagande des hérauts de la « révolution citoyenne », difficile d’y voir clair. 

Bien qu’il soit impossible de dresser un bilan complet, certaines caractéristiques de la gestion de Correa nous interpellent. En tant que militants, français, latino-américains et notamment équatoriens, engagés dans des luttes concrètes contre l'extractivisme, l'autoritarisme et le capitalisme (non, nous ne sommes pas des agents de la CIA), nous sommes inquiets de constater que la « révolution citoyenne » de Correa sert de source d’inspiration aux dirigeants et militants en quête « d’alternatives » qui ne semblent pas être au fait des réalités locales, ou qui décident de les ignorer au risque de cautionner des politiques, discours et attitudes contre lesquels ils se battent ici-même en Europe. Une mise au point s’impose.

 (1) Rafael Correa est-il anticapitaliste ?

Il nous répond lui-même : « Nous faisons mieux avec le même modèle d’accumulation, plutôt que de le changer, parce que notre intention n’est pas de porter préjudice aux riches, mais de parvenir à une société plus juste et équitable »[1].

 (2) Quel genre de démocratie est l’Equateur de Rafael Correa ?

Rafael Correa et son mouvement politique, Alianza País, ont enclenché un processus de modification de la Constitution (promulguée lors de son premier mandat), qui lui permettrait de briguer plus de deux mandats successifs[2], contredisant ce qu’il affirmait il y a peu : « ce serait très malheureux qu'une personne soit si indispensable qu'il faille changer la Constitution pour modifier les règles du jeu »[3]. La même réforme constitutionnelle donnerait à l’armée le droit de participer à des opérations de sécurité publique (article 158), limiterait la possibilité de citoyens de se défendre contre les actes abusifs de l’Etat (article 88) et ferait de la « communication gouvernementale » un service public impliquant un droit de diffusion (au nom de ce service) et un contrôle accru sur les médias publics et privés (article 384)[4].

De même, le décret présidentiel n°16 [5] « encadre » si bien l’activité des associations que, quelques mois après son entrée en vigueur, il a déjà permis la fermeture de la Fundación Pachamama pour le motif qu’elle aurait exercé une activité politique menaçant la sécurité de l’Etat[6]. Pour rappel, en vertu de ce décret, l’activité politique n’est autorisée qu’aux partis politiques, officiellement inscrits comme tels, sous peine de dissolution ou de poursuites pénales! Quelle liberté pour les contre-pouvoirs existe-t-il aujourd’hui en Equateur si critiquer l’action du gouvernement peut mener les représentants d’une association en prison ? Qu’est-ce qu’une « activité politique » ? Il s’agit bel et bien d’un ensemble de réformes anti-démocratiques et elles ne sont pas le fruit du hasard.

Sous les mandats de Rafael Correa, les projets d’exploitation de ressources naturelles sont lancés sans consultation des communautés indigènes[7], en violation de la convention 169 de l'OIT (ratifiée par l’Equateur) et de la Constitution, instaurant un climat de peur et de répression des opposants : emprisonnement sans preuve, assassinats inexpliqués, répressions violentes, vexations quotidiennes. Dans la Cordillère du Condor (en Amazonie), trois de nos camarades ont ainsi récemment disparu : en 2009, Bosco Wisum est tué par la police lors d'une manifestation en opposition à la nouvelle loi sur l'eau (favorisant sa privatisation) ; en 2013, Freddy Taish est abattu lors d'une opération de l'armée ; enfin, en 2014, le corps sans vie de José Tendetza, opposant notoire au mégaprojet minier chinois Mirador, est retrouvé dans un affluent du Rio Zamora. Javier Ramirez, un des leaders de l’opposition à l’exploitation du cuivre en Intag, a été emprisonné durant 11 mois sans que les faits qui lui sont reprochés ne soient établis, tandis qu’un autre opposant, Carlos Zorrilla, d’origine cubaine mais qui réside en Equateur depuis 1978, a été accusé publiquement par le président Rafael Correa en personne, lors de son émission télévisée hebdomadaire, d’être « un étranger qui empêche le développement [du] pays » ![8]

Enfin, à propos de l’avortement, nous vous laissons juger : en 2013, lorsqu'un petit groupe de députées appartenant à Alianza País (parti de Rafael Correa) proposent de le dépénaliser en cas de viol, Rafael Correa, fervent catholique, menace de démissionner et dénonce la « trahison » des députées, tout en jurant qu’il refuserait d’accepter cette décision du parlement si elle était votée[9]. Son secrétaire juridique, Alexis Mera, un homme politique qu’on situerait volontiers à l’extrême droite en France, qualifiera de "mal baisées (mal culiadas)" les féministes pro-avortement[10] ! Ambiance.

(3) La « révolution citoyenne » de Rafael Correa est-elle portée par les mouvements populaires, indigènes et paysans ?

Imider, cinq ans de résistance contre une mine d'argent : entretien

Date de publication: 
Mercredi, 25 Février, 2015
Par: 
Collectif Aldeah
26 juillet 2014 Imider Maroc26 juillet 2014 Imider MarocCela fait quelques temps que le collectif Aldeah reçoit régulièrement des (mauvaises) nouvelles du mouvement 96 Imider qui lutte contre l'industrie minière dans le sud du Maroc. La répression que subissent les opposants de la part des forces de l'ordre n'est pas sans rappeler, peut-être, celle qui a pu avoir lieu en France contre les opposants au barrage du Testet ou à l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes proche de Nantes. Elle est le lot commun de ceux qui, un peu partout sur Terre, luttent contre ce que nous nommons l'extractivisme et les "Grands Projets Inutiles Imposés" (GPII). Voici l'entretien que nous avons eu avec un des portes-parole francophones du mouvement marocain. "

« Avant l'ère du protectorat français, la tribu de « Ait Atta » vivaient librement dans leurs larges territoires, cette époque a connue beaucoup de conflits entre les différentes tribus amazighes sur les terres, mais après  l’année 1935, les autorités françaises ont conservé, pour chaque tribu,  les terrains  contrôlés par cette dernière et sur lesquels elle exerce ses activités agricoles. En 1953, le roi Med V a validé ces bases juridiques » disait O.Brahim, un homme âgé de IMIDER.

En France, on reçoit des informations de votre combat à Imider, pourriez vous nous préciser depuis quand vous luttez et contre quoi exactement ?

 Depuis le 1er août 2011 et dans le cadre du Mouvement sur la voie de 96 (MSV96), les militants de la commune rurale d'Imider lutte​nt contre:
  • le pillages des richesses naturelles par la Société Métallurgique d'Imider (SMI) 
  • la destruction de l’environnement  à cause de la pollution et de la surexploitation des richesses naturelles (eau, terres, sables et mines...) par la SMI. 
  • les politiques de marginalisation, d'appauvrissement et d'exclusion menées par l'Etat à l’égard des communautés.
Et luttent pour:
  • la promotion des secteurs sanitaire et de l’éducation ainsi que le renforcement des infrastructures de base.

Eau à ImiderEau à ImiderQu'est-ce qu'extrait la mine d'Imider et pour quel usage ?

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Comment assimiler les écologistes aux terroristes : la leçon du Canada

Au nom de la lutte antiterroriste, le gouvernement canadien de Stephen Harper utilise depuis des années l’appareil policier pour museler le mouvement écologiste qui conteste ses projets pétroliers. La méthode inspire discrètement les gouvernements européens.

Les terroristes posent des bombes et tuent des gens pour traumatiser la société alors que les écologistes tendent des banderoles sous la neige pour protester contre des oléoducs. La précision paraît anodine mais depuis quelques années, au Canada, elle devient utile tant le gouvernement fédéral s’est évertué à brouiller la distinction.

"Nous, on a choisi des manières pacifiques de contester. Ce n’est pas parce qu’on s’assoit au milieu du chemin pour bloquer un camion qu’on est des criminels. Il faut faire la différence entre un terroriste qui va faire sauter un puits et quelqu’un qui s’asseoit pour défendre ses droits."

Ainsi se justifiait avec son accent du nord de Québec, Serge Fortier du Regroupement inter-régional sur le gaz de schiste de la Vallée du Saint-Laurent. En 2013, ce militant associatif a découvert qu’il avait été mis sur écoute par les services de renseignement de son pays pour avoir manifesté contre l’exploitation de ces hydrocarbures dans sa région.

Aucun attentat n’a justifié une telle radicalisation de la surveillance des groupes environnementalistes canadiens. Tout part d’un projet économique érigé en dogme politique par le gouvernement libéral de Stephen Harper. Même si, indirectement, Serge Fortier a été la victime d’un arsenal anti-terroriste laissé à l’abandon au lendemain du 11 septembre 2001.


 Etape 1 : requalifier l’ennemi

L’évolution de la définition du terrorisme qui mènera à espionner des militants anti-gaz de schiste débute au lendemain des attentats du World Trade Center. Une remise en cause s’opère alors dans les structures de surveillance nationales, notamment aux Etats-Unis et au Royaume-Uni mais aussi au Canada : comment avons-nous pu laisser passer ça ? Une doctrine émerge alors autour de la “fusion” des responsabilités des différentes agences et de l’élargissement de leurs prérogatives.

Deux événements d’ampleur mondiale se déroulant au Canada en 2010 vont servir de laboratoires à cette nouvelle politique sécuritaire : le sommet du G20 à Toronto et les Jeux Olympiques de Vancouver. En vue de ces deux rassemblements pouvant constituer des “cibles” aussi bien pour des menaces intérieures qu’extérieures, une nouvelle structure est créée : l’Unité de sécurité intégrée (ISU) de Vancouver, disposant des services de 15 500 policiers de 120 agences de sécurité gouvernementales.

Sur le modèle des “fusions centers” américains, cette “super-administration” dispose d’un accès étendu à toutes les données des forces de police. Cette extension tentaculaire va l’amener à inclure dans son “schéma de menace” des organisations sans grand rapport avec le terrorisme.

 
“Extrêmistes à motivation multiple”

Focalisé au départ sur al-Qaeda, l’ISU va progressivement surveiller toutes les organisations exprimant une opposition politique aux Jeux olympiques : écologistes préoccupés par la destruction d’espaces naturels pour les installations, syndicalistes protestant contre les conditions de travail, Indiens de Colombie britannique dont les terres furent rognées par les sites… Les chercheurs Kevin Walby et Jeffrey Monagham, qui ont étudié des rapports des services de renseignements rendus publics via la loi de libre accès à l’information, décrivent cette dérive :

"Alors que les Jeux de Vancouver approchaient, l’ISU a réalisé que l’opposition intérieure était la source de trouble la plus probable et a mis en place une série d’opérations d’étouffement des mouvements anti-Jeux. [...] Par exemple, des officiers de l’ISU ont donné de nombreux coups de fil au domicile d’activistes ou critiques avant les JO. Entre le 3 et le 5 juin 2009, environ 15 activistes anti-Jeux ont été visité par huit agents de l’ISU. L’ISU disposait également d’agents infiltrés qui ont passé plusieurs années au sein des groupes de Colombie Britannique et d’Ontario."

Pour qualifier ces nouvelles cibles, l’ISU et les agences gouvernementales ne disposaient pas d’outils “théoriques”. Il leur fallu donc inventer un terme assez large et imprécis pour rassembler sous une même bannière préoccupations environnementale, sociale et indiennes. Le vocable forgé au début des années 2000 par ces organisations fut “multi issue extremists”, soit “extrêmistes à motivation multiple”.

Entre mai 2005 et janvier 2010, Walby et Monagham prennent connaissance de 25 rapports de renseignement mentionnant ce terme tandis qu’Al-Qaeda et les organisations terroristes reconnues en disparaissent progressivement. Plus préoccupant, cette terminologie finit de lever les barrières entre terroriste, extrêmiste et activiste pour les tisser en une matrice de menaces indéfinies, comme nous l’expliquait Kevin Walby :

"Au départ, le terme MIE avait été fabriqué pour les JO mais il leur a survécu et a muté en un terme “attrape-tout”, qui recouvre désormais les activistes natifs de “Iddle no more” comme les activistes anti-pipelines."

Le mode d’action violent n’étant plus le critère pour juger des terroristes et des non-terroristes, la surveillance peut cibler n’importe quel opposant. Non content de redéfinir les personnes, les services de sécurité canadiens vont jusqu’à redéfinir les actes de terrorisme. Selon d’autres documents du CSIS (les services de renseignement canadiens), le blocage de route ou de l’accès à des immeubles apparaît désormais comme “des formes d’attaque” aux yeux des forces de l’ordre.

Eloge de la ZAD

Date de publication: 
Lundi, 24 Novembre, 2014
Par: 
Des zadophiles non fanatiques de Nantes, Grenoble, de Carcassonne, et d’ailleurs

Maintenant que s’éteignent les diverses versions qui voulaient couvrir les raisons du meurtre de Rémi F. par l’État — de l’élaboration du mentir-vrai qui tient lieu de discours officiel à la dissolution des responsabilités par gradation hiérarchique, j’ai obéi, j’ai donné l’ordre d’obéir, on ne doit pas mettre en cause la volonté d’obéir — on ne peut pas s’arrêter à demander, même fermement, des démissions, une police mieux faite, etc.

Ce qui a été visé dans la nuit de Sivens, c’est le scandale que représente l’existence même des ZAD et leur possible dissémination. Les ZAD et leurs partisans ne veulent pas uniquement empêcher un aménagement mais y substituer autre chose et c’est l’audace de ce programme, aussi rudimentaire soit-il, qui commence à perturber les partisans du nihilisme de la croissance.

Une ZAD est un territoire où des êtres décident de se passer des institutions pour construire leurs vies. Elle se constitue comme « zone à défendre », mais ses perspectives et sa raison d’être sont en réalité offensives car elle est aussi le lieu pour une opposition résolue au grand saccage de l’aménagement, où peut s’expérimenter des relations humaines hors du cash, de la hiérarchie, de l’utilitarisme économique (écologique), en bref de l’unique pensée des obsessionnels du développement ; le lieu où tente de s’élaborer une utopie à portée de lutte.

« Pour donner corps aux communaux, une assemblée saisonnière ne suffira donc pas, il s’agit de faire communauté. Si nous voulons parvenir à faire coexister les différents usages du territoire, les différents rapports au monde qui se déploient dans ce bocage, il nous faut créer des coutumes, des rites, des solidarités et des habitudes communes. Multiplier les moments de travail en commun, densifier les échanges et les solidarités, les dons et contre-dons qui font l’épaisseur de nos liens. Il faut pour cela construire d’autres espaces, expérimenter d’autres outils, d’autres pratiques, d’autres formes que les assemblées, même si ces dernières sont indispensables par ailleurs. Il nous faut approfondir les rencontres, les passerelles entre les mondes, et les amitiés improbables nées de cette lutte. »
(De la ZAD aux communaux ? Quelques pistes à explorer pour aller plus loin…, texte circulant à Notre-Dame-des-Landes).

Sans conteste, ce genre d’idéal pratiqué et érigé en plate-forme commune pourrait cristalliser et fédérer bien des refus, des dégoûts que suscite cette société.

Pour en revenir au barrage de Sivens, la mise en commun des 184 retenues d’eau privées, totalisant trois fois la capacité du barrage, accélèrerait le démantèlement nécessaire du totalitarisme industriel.

La possibilité d’une multiplication des ZAD est un véritable cauchemar pour la domination et c’est pour cela qu’elle commence à mobiliser ses troupes citoyennes. A Albi, la FNSEA organise une manifestation probarrage et dénonce les zadistes comme « djihadistes verts » ; à Nantes le lobby du BTP et son émanation associative défilent pour un démarrage immédiat du chantier accusant l’ACIPA et les Verts « d’être la vitrine légale d’un mouvement armé » (sous-entendu les zadistes) ; à Grenoble les milieux économiques coalisés sous l’égide de la Chambre de commerce et d’industrie font passer en force le tourisme sous bulle de verre dans la forêt des Chambarans ; à Carcassonne les productivistes agricoles laissent derrière eux une banderole sur laquelle est écrit « Mort aux loups et aux écolos (les écolos en premier) ».

Nul doute qu’avec le temps ils progresseront, appuyés par tous les représentants de la machine à gouverner, vers une définition plus exacte de ceux qui réellement dérangent. Nous aussi.

SIgné : Des zadophiles non fanatiques de Nantes, Grenoble, de Carcassonne, et d’ailleurs

Source : http://tantquilyauradesbouilles.wordpress.com/2014/1...

Le néocolonialisme made in France de Maurel & Prom dans l’Amazonie péruvienne

Date de publication: 
Dimanche, 14 Septembre, 2014
Par: 
Simone Garra
 

Dans la présentation de l'article, Sevindi.org écrit : «  L'entreprise Maurel et Prom, connue pour ses antécédents désastreux et ses méthodes visant à diviser, et moralement répréhensibles, opère en collaboration avec l'entreprise canadienne Pacifique Rubiales, dans un contexte de tension et de conflit, contexte dans lequel les autorités péruviennes semblent être totalement absentes – ce qui favoriser les opérations de l'entreprise. »

Personnellement, il me semble que les autorités péruviennes sont loin d'être absentes de la région de Condorcanqui. En outre, je ne crois pas que  la présence desdites autorités puisse représenter un obstacle à l'expension de l'entreprise.
Les autorités péruviennes sont fortement présentes à Condorcanqui depuis les années 1950, date à partir de laquelle l'Etat péruvien a commencé à militariser la frontière avec l'Equateur en raison des tensions relatives à la délimitation territoriale. Avec pour objectif de « civiliser » les populations indigènes et de pacifier ces groupes traditionnellement guerriers, l'Etat péruviens a promu leur scolarisation avec l'appui des missionnaires jésuites et des linguistes protestants de l'Institut Linguistique de Verano. Il s'agit d'un processus qui a profondément transformé la vie et l'organisation sociale des Awajún, en les rendant dépendants sur le plan économique et politique.
Actuellement, la présence des autorités péruviennes s'accroit à travers l'éducation imposée par l'école. Cette dernière méprise la culture locale, promeut des idées machistes et nationalistes, et enseigne aux jeunes à « se surpasser professionnellement », ce qui a pour effet d'installer un esprit de compétition. Elle est violemment inculquée aux awajún qui sont contraints de faire leur service militaire.
De telles valeurs régissent également l'administration politique de la région, tant au niveau des districts qu'au niveau de la province. Comme c'est le cas dans tout pays, les autorités péruviennes sont ici synonymes de « clientélisme et corruption », ce qui favorise à coup sûr les intérêts des entreprises pétrolières.
Enfin, les autorités péruviennes sont présentes à travers les forces armées et policières, toujours prêtes à intervenir en cas de troubles, comme ce fut le cas le 5 juin 2009. Nous rappelons que l'entreprise minière Afrodite, installée dans la Cordillère du Condor, opère sur un zone militaire, ce qui lui permet d'être assurée sur le plan des infrastructures nécessaires et de la protection contre les populations locales qui sont hostiles au projet.
De mon point de vue, au Pérou comme partout dans le monde, ce n'est pas la présence de l'Etat qui favorise l'exploitation des hommes et de la nature. Au contraire, en assurant les conditions d'existence sociales et matérielles des capitalistes, l'Etat défend leurs intérêts.

Simone Garra

Servindi : http://servindi.org/actualidad/112742

Rien ne semble freiner l’insatiable  soif d’argent des entreprises pétrolières, responsables dans le monde entier  de guerres, de corruptions, de régimes totalitaires et de catastrophes environnementales. Il y a six ans, dans le nord de l’Amazonie, les peuples Awajun et Wampis saisissaient leurs lances et se mettaient sur le pied de guerre: ce fut  le début de deux périodes de mobilisations nationales dans l’Amazonie péruvienne, contre l’invasion du capitalisme international et le pillage des ressources en terres indigènes. “la forêt ne se vend pas, elle se défend” fut la réponse de millier de femmes et d’hommes qui, entre 2008 et 2009 luttaient contre les nombreuses lois dont l’objectif  clair et explicite était d’éliminer les obstacles juridiques pour les grandes entreprises dans la région  amazonienne. Le cinq juin 2009,  c’est balles contre lances ! La répression de l’état ne s’attendait pas à rencontrer une riposte tant aguerrie: des policiers sont désarmés par les manifestants et tués, les habitants de la ville de Bagua, solidaires avec les manifestants, se soulèvent et brûlent des bâtiments publics. [1]Tout le pays tremble face à cette vague de révolte qui depuis l’Amazonie arrive aux Andes et sur les côtes océaniques. Au bilan, des dizaines d’arrestations, des persécutions d’organisations solidaires, des tortures dans les prisons. Trois des manifestants encourent plus de cinq ans de prison. Un procès s’ouvre le 14 mai 2014 contre 53 manifestants, la justice demande des peines exemplaires allant de de 22 ans de prison à la condamnation à perpétuité. Pour imposer leur domination absolue les multinationales terrorisent, répriment et punissent matant toutes contestations.

Un an après les événements de la ville de Bagua une entreprise française vient s’installer à Condorcanqui au cœur du village Awajun Wampis comme si rien ne s’était passé. Comme si elle ignorait que ces villages, dès leurs premiers communiqués avaient rejeté la présence d’entreprises pétrolières sur leur territoire. Comme s’ils n’avaient pas suffisamment de problèmes avec d’autres entreprises telles que la minière Afrodita-Dorado Péru installée dans la Cordillère du Condor. Comme si les peuples Awajun et Wampis n’avaient pas réclamé depuis 2007 l’annulation de la concession du lot 116 à l’entreprise colombienne Hocol qui l’avait obtenue en 2006 sans aucun processus de consultation préalable[2].

C’est ainsi qu’en 2010, l’entreprise Maurel et Prom (MP) récupère la concession du lot 116 en se substituant à l’entreprise colombienne Hacol. L’histoire de Maurel et Prom qui, sur son site internet, se vantait d’avoir perforé plus de 100 puits d’exploration dans 12 pays et 4 continents, montre clairement la continuité qu’il existe entre le colonialisme et la nouvelle domination  des entreprises pétrolières. En effet, Maurel & Prom était initialement une entreprise de transport maritime pour les produits qui arrivaient des colonies françaises d’Afrique Occidentale, comme la Côte d’Ivoire (Côte de Marfil), le Sénégal, le Cameroun et le Congo. Dans la décennie 1970 Maurel & Prom se transforme en entreprise d’élevage industriel de poulets et de poissons et dans la décennie 1990 elle entre dans le commerce de  l’énergie et des mines à Madagascar et elle étend rapidement sa domination  dans les pays les plus pauvres d’Afrique où elle exploite les ressources et les populations en négociant avec les régimes sanguinaires et en provoquant des catastrophes environnementales[3].

En 2012, au Gabon, alors que l’entreprise annonçait une augmentation de 72% de son chiffre d’affaire atteignant ainsi les 376,3 millions d’euros annuels, les habitants de la région du lac Ezanga dénonçaient l’empoisonnement des sources d’eau, l’apparition de maladies gastriques et le premier cas de mort imputable à ces maladies[4]. D’un autre côté́, ils dénonçaient le non-respect des promesses tenues par l’entreprise : «Les responsables de la compagnie avaient contractés une série d’engagements qu’ils n’ont malheureusement pas respectés.

Pérou: Tentative d'expulsion et menaces de mort contre la défenseuse des droits humains, Mme Máxima Acuña de Chaupe et sa famille

Dans la matinée du 4 février 2014, 18 agents de la division des opérations spéciales de la police nationale péruvienne (DINOES), sont entrés dans la propriété de la défenseuse des droits humains, Mme Máxima Acuña de Chaupe à Tragadero Grande, dans le but de mettre fin à ses activités agricoles et d'expulser toutes les personnes présentes. Le 30 janvier 2014, la défenseuse a reçu un appel menaçant.

Máxima Acuña de Chaupe est membre de l'Asociación de Mujeres en Defensa de la Vida (Association des femmes pour la défense de la vie) et de l'Unión Latinoamericana de Mujeres - ULAM (Union latino-américaine des femmes). La défenseuse des droits humains vit sur ses terres à Tragadero Grande, Sorochuco, Cajamarca, depuis 24 ans. En 2011, la compagnie minière Yanacocha a essayé d'acheter les terres de la défenseuse et, lorsque celle-ci a refusé de vendre, une campagne d'intimidation et de violence a débuté. Máxima Acuña de Chaupe est devenue un symbole de l'opposition à une mine d'or et de cuivre à ciel ouvert appelée Conga, et elle soutient les personnes expulsées de force dans le cadre du développement de la mine. Yanacocha est conjointement détenue par la US Newmont Mining Corporation (51,35 %) , l'entreprise minière péruvienne Buenaventure (43,65 %) et la Banque Mondiale (5 %), et couvrira sur surface de 2000 hectares, comprenant quatre lacs de haute montagne.

Le 4 février 2014, 18 agents de la DINOES sont arrivés dans trois camions dans le but de mettre fin au travail de Máxima Acuña de Chaupe et sa famille sur leurs terres. Cette tentative d'expulsion intervient après un incident qui s'est produit le 30 janvier 2014; ce jour-là à 10h30, la défenseuse a reçu un appel menaçant où un interlocuteur a dit « quitte ta propriété sinon tu vas mourir ». Deux heures plus tard, sa fille et elle inspectaient leurs champs, quand deux agents de la DINOES sont venus vers elle et lui ont dit qu'elle ne devrait pas cultiver ici, car elle n'est pas sur sa propriété. Deux autres agents marchaient sur ses terres et quatre autres étaient assis dans deux camions devant la maison. À midi, un policier et un agent de la DINOES armé sont entrés dans la maison et ont ordonné à tout le monde de partir immédiatement. Lorsque les agents ont vu que Máxima Acuña de Chaupe téléphonait à une station radio locale, « Radio Lider », ils ont quitté les lieux.

La chasse aux sorcières

Date de publication: 
Jeudi, 30 Janvier, 2014
Par: 
Raquel Neyra

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Au Moyen Age, à l’époque de l’obscurantisme, tout individu un peu différent des autres était condamné sans autre forme de procès. A ces époques-là l’ignorance était reine. Tout individu différent finissait par être rejeté. C’est ainsi que des femmes au savoir ancestral ou simplement hors normes ou un peu rebelles étaient qualifiées de sorcières. Elles terminaient sur le bûcher parce qu’elles représentaient un danger pour le pouvoir de l’époque, qui cherchait à maintenir la population dans l’ignorance.

Des centaines d’années se sont écoulées et dans notre pays, le Pérou, il émerge de nouveau un processus assez semblable aux meilleures époques de Mc Carthy – sénateur états-unien connu pour sa politique de « chasse aux sorcières » – c’est-à-dire ces personnes qui pouvaient constituer un danger pour le système capitaliste prédateur.

Les débuts de cette chasse aux sorcières commencent avec la loi 30151 qui concède l’impunité aux forces de l’ordre faisant usage de leurs armes et aux éternelles plaintes et diffamations concernant n’importe quel opposant au projet minier Conga, et aux autres projets extractivistes dans le pays.

Non content de dresser la population contre les défenseurs de l’environnement, on dénonce maintenant d’étranges forces occultes étrangères qui étendraient des mains menaçantes sur notre pays et s’opposeraient à des investissements (c’est-à-dire à des investissements étrangers aussi, mais il semble que pour le gouvernement ceux-ci seraient les « bons »).

Une paire de petites ONG, y compris certaines reconnues internationalement et membres de conseils des Nations Unies, ou quelques sénateurs ou députés qui profitent de la liberté d’expression et d’action dans leur pays européen, peuvent-ils se révéler si puissants et empêcher un investissement minier ?

Ennemi de l’État : Carlos Zorrilla et la bataille pour Intag

Date de publication: 
Lundi, 27 Janvier, 2014
Par: 
Par Gerard Coffey, Linea de fuego, 6 janvier 2014, traduction pour www.aldeah.org

« Un étranger qui empêche le développement de notre pays », c’est ainsi que Carlos Zorrilla, membre fondateur de  la DECOIN (Défense et protection écologique d'Intag, association connue pour son opposition aux projets d’exploitation de cuivre dans la vallée d’Intag), a été désigné par le président de l’Equateur en personne. Le 28 septembre dernier, lors de son émission télévisée hebdomadaire « Enlace Ciudadano », Rafael Correa a présenté à la Nation des photos de militants d'Intag, dont celle de Carlos Zorrilla, en les accusant de mener des activités « déstabilisatrices » et de faire de l’ingérence dans la politique nationale. A l'occasion d'un autre discours télévisé, le 7 décembre, le président Correa a une nouvelle fois nommément accusé Carlos Zorrilla, né à Cuba, de défendre des intérêts étrangers et a appelé la population équatorienne à "réagir". Aux côtés de nombreuses autres associations et collectifs, vigilants et solidaires avec la lutte d’Intag, nous souhaitons exprimer notre plus vive préoccupation devant cette attitude non seulement xénophobe mais qui, venant d’un chef de l’Etat, met directement en danger la sécurité des militants écologistes de la région. Afin de faire connaître qui est réellement Carlos Zorrilla, nous publions ci-après la traduction de l’article paru à son sujet dans Linea de Fuego.  Le Collectif ALDEAH.

Né à Cuba, il a quitté l’île lorsqu’il avait 11 ans, prenant la route des États-Unis avec sa famille. La terre promise ne l’a pas convaincu. Comme beaucoup de personnes de sa génération, il n’a pas accepté la guerre que son pays d’adoption menait au Viêtnam, et les manœuvres politiques du président d’alors, Richard Nixon, ne lui convenaient pas non plus. Il s’en est allé. Il cherchait un endroit où vivre en paix. En 1978, dans la vallée d’Intag (Imbabura), il a trouvé une zone agricole attrayante, habitée par des communautés fortes et solidaires. Et il est resté là-bas. « J’adore l’agriculture », confesse Carlos Zorrilla.  Sa décision n’est pas difficile à comprendre. La zone d’Intag, située sur les contreforts occidentaux du volcan Cotocachi, est chaude, verte et franchement belle. Peuplée à la fin du XIXe siècle par des familles ayant migré depuis d’autres secteurs d’Imbabura, ce district subtropical, principalement agricole, est riche en eau, en biodiversité et en paysages spectaculaires.

Mais l’histoire de Zorrilla en Intag n’est pas celle d’un bonheur bucolique, d’une promenade dans les nuages. La paix et la vie collective ne se donnent pas facilement. Il y a du cuivre dans les collines et, à double deux reprise durant ces dernières décennies, des entreprises étrangères ont cherché à exploiter ce minerai. « La première fois nous avons appris la présence d’une entreprise minière dans la zone à la fin de l’année 1994, dit Carlos, c’était la japonaise Bishimetals, une filiale de la multinationale Mitsubishi. Au début, les gens ne savaient pas pourquoi elle était là ».  

L’année suivante, les activités de l’entreprise minière les ont amenés, lui et Giovanni Paz, un prêtre d’Imbabura, ainsi que d’autres, à créer l’association DECOIN (Défense et Conservation Ecologique d’Intag), pour protéger la biodiversité de la région et développer des projets soutenables. « Nous savions que ces projets étaient importants pour l’avenir », témoigne Silvia Quilumbango, l’actuelle Présidente de DECOIN.