Anna BEDNIK, dans Résistances, revue Pandora, nº8, Paris VIII, 2008
Au Pérou et au Guatemala, les votations citoyennes cherchent à freiner l’installation des entreprises minières. Les indigènes de l’Amazonie équatorienne poursuivent en justice Chevron-Texaco pour les dégâts occasionnés par ses activités d’exploitation pétrolière. Au Chili, les mapuches luttent contre les entreprises forestières. En Honduras, les pêcheurs tentent de contenir le développement d’élevages industriels de crevettes dans les mangroves. Ce ne sont que quelques exemples des nombreux fronts de résistance populaire contre l’exploitation industrielle des ressources naturelles.
En ce sens, les résistances qu’opposent à ces industries les populations à grande majorité rurales et paysannes peuvent être vues comme le résultat d’une conjonction de volontés visant à protéger un certain équilibre de vie. Cette opposition se nourrit aussi du sentiment d’injustice face au peu de place laissé à l’expression des volontés des populations locales à l’intérieur des processus décisionnels qui sont amenés à régir leur devenir. De là, certains mouvements socio-environnementaux franchissent le pas entre revendiquer leur droit à l’autodétermination et l’exercer pleinement. Ils transforment alors leur résistance en une force créatrice, génératrice de propositions nouvelles, qui vont des solutions locales et tangibles de production ou d’échange à des formes inventives de penser le « développement » et de concevoir l’harmonie entre la société et son environnement naturel. Les multiples réseaux d’acteurs locaux, nationaux et internationaux qui, dans bien de cas, se fédèrent autour de ces mouvements de résistance, esquissent en même temps des formes d’interaction sociale dont les objectifs et les modes de fonctionnement défient la certitude de l’inéluctabilité de la mondialisation néolibérale.
L’histoire de la résistance au projet d’exploitation de cuivre en Intag, dans le nord-ouest de l’Equateur, illustre la possibilité de cette transformation et « ouvre une fenêtre d’espoir » pour tous ceux qui, en Amérique latine ou ailleurs, refusent la destruction des ressources naturelles au nom du développement économique.