Langue

France Amérique Latine

Articles

« Plus d’extractivisme pour sortir de l’extractivisme» : le pari risqué de Correa

Mine à ciel ouvertMine à ciel ouvertL’annonce de l’abandon de l’initiative Yasuní-ITT [1] par le président Rafael Correa a suscité l’émoi des mouvements écologistes et a attiré l’attention des médias internationaux sur ses politiques dans le domaine des industries extractives¹. Mais qu’en est-il de l’action du gouvernement dans ce secteur? Dans quelle mesure est-elle compatible avec son projet politique ouvertement socialiste et avec les principes pionniers mis en avant dans la Constitution de 2008?

Extension de la frontière extractive

À  l’instar  de  nombreux  autres  pays  d’Amérique Latine, l’Équateur s’est lancé, depuis l’élection de Rafael Correa, dans une ré-primarisation de son économie, incarnée par une extension marquée de la frontière extractive dans les secteurs minier et pétrolier. Mis à part le poids croissant du pétrole dans l’économie et l’ouverture symbolique du parc Yasuní à l’exploitation, le gouvernement a lancé en 2012 une vaste campagne de titularisation de nouveaux permis d’exploration pétrolière, lesquels couvrent près d’un quart de  l’Amazonie équatorienne  (environ  3  millions  d’hectares).

L’Équateur  a  également  parié  sur  l’exploitation minière  industrielle.  Cinq  nouveaux  projets  à grande échelle ont été classés comme « stratégiques » : les projets cuprifères à ciel ouvert de Mirador et Panantza-San Carlos, et aurifères de Río Blanco, Fruta del Norte et Loma Larga. Une quinzaine d’autres projets, moins avancés, sont également en cours. Malgré une réduction substantielle du nombre de permis miniers par rapport à la période néolibérale, près de 5% de la superficie du pays reste dédiée à l’exploration minière.

Argentine, nouvelle frontière des gaz de schiste

Entretien avec Diego di Risio, à retrouver dans le prochain FAL MAG.

Observatorio Petrolero Sur, organisation du réseau OilWatch, travaille depuis cinq ans sur les problèmes environnementaux, sociaux et économiques générés par l’exploitation d’hydrocarbures en Argentine. Diego di Risio, membre de l’Observatorio, répond à nos questions au sujet de l’exploitation des gaz et huile « de schiste ».

Où en est l’exploitation de gaz et huile de schiste en Argentine ?

L’histoire des hydrocarbures non conventionnels en Argentine commence en 2009 - 2010. Dans un contexte de baisse importante des niveaux de production, ce sont les différents gouvernements provinciaux - qui exercent le contrôle sur les ressources naturelles (et décident de leur exploitation, ndlr), mais aussi l’Etat national, qui ont fait leur promotion. La province de Neuquén, dans le nord de la Patagonie, est devenue le fer de lance de l’avancée de l’exploitation des hydrocarbures de schiste, et on y exploite déjà des formations de tight gaz . La province compte déjà 200 puits forés. Au-delà de cette formation, connue comme “Vaca Muerta”, les gisements s’étendent sur une bonne partie du pays, y compris dans des bassins qui n’ont pas encore été explorés et qui n’ont pas d’histoire pétrolière. YPF et d’autres entreprises ont aussi l’intention d’explorer dans le nord-est, à la frontière avec Uruguay et le Brésil. Dans cette zone se trouve l’aquifère Guarani, l’un des plus grands aquifères d’eau douce au monde. Selon l’agence américaine EIA (Energy information administration), l’Argentine recèlerait la troisième réserve mondiale de gaz de schiste.

« Eau et Extractivisme » au FAME 2012 [FAL MAG]

Date de publication: 
Dimanche, 6 Mai, 2012
Par: 
Anna Bednik

 «Nous qui appartenons aux différentes luttes contre l’extractivisme […], originaires de nombreux pays du Sud et du Nord, nous nous reconnaissons comme faisant tous partie du même combat […] », [1] - ont déclaré, après deux jours d’ateliers et débats, les participants aux activités de l’axe thématique « Eau et Extractivisme » du FAME 2012. Argentins, Brésiliens, Chiliens, Colombiens, Equatoriens, Guatémaltèques, Mexicains, Péruviens, Pakistanais,… Allemands, Bulgares, Etats-uniens, Irlandais, Polonais, Turcs, Français…, - nous avons été nombreux à nous rassembler autour de ce thème.

Luttes contre l’extractivisme ? Le FAME 2012, avec un axe thématique dédié (6 ateliers et tables rondes) leur a fait la part belle, en assumant de désigner l’extractivisme comme tel, y compris ici en France, où cet emprunt au vocabulaire d’outre-Atlantique faisait surtout référence jusque-là à des combats et débats d’ailleurs. Dans les milieux universitaires et militants d’Amérique hispanophone [2], le terme «extractivisme », amplement utilisé, ne s’arrête généralement plus aux industries extractives au sens strict (mines et hydrocarbures). Il se rapporte, par extension et de façon beaucoup plus large, à l’accélération de toutes les activités d’exploitation des « ressources naturelles » à échelle industrielle (comprenant l’agro-industrie et jusqu’à la conception d’infrastructures facilitant les activités d’extraction). 

Comme de nombreux mots en «isme » - qui évoquent un courant de pensée, un paradigme, voire une idéologie -, « l’extractivisme » se réfère aussi à plusieurs niveaux de réalité qui font système. Il désigne la place centrale de l’extraction des «ressources naturelles » pour les économies exportatrices de matières premières.

Documents

OSER AFFRONTER L'EXTRACTIVISME

OSER AFFRONTER L'EXTRACTIVISME, Dossier du FAL Magazine numéro 104, premier trimestre 2011, p.12 à 29

Depuis les années 2000, l’accélération des projets d’exploitation des « ressources naturelles » en Amérique latine est d’une ampleur sans précédent. Mines, puits de pétrole et de gaz, barrages hydroélectriques, monocultures agricoles et forestières, élevages industriels, concessions marines, etc., - l’extractivisme avance sans cesse sur de nouveaux espaces, en détruisant les écosystèmes et la santé des populations, en privatisant les territoires, en déstructurant les liens sociaux, en bouleversant les cultures et les activités traditionnelles. Les conflits « socio-environnementaux », qui éclatent face à cette situation d’urgence, sont aujourd’hui parmi les conflits sociaux les plus importants (au Pérou, pour ne donner qu’un exemple, ils représentent plus de la moitié de tous les conflits actifs). Les mouvements populaires, qui se forment dans ces conflits, n’établissent pas d’hiérarchie entre le social et l’environnemental. Non seulement ils osent affronter, dans un combat inégal, les entreprises et les pouvoirs en place, mais ils questionnent aussi le modèle, tout en inventant de nouvelles formes d’organisation, d’action et de pensée. Leurs problématiques ne sont pas si éloignées des nôtres. La demande de matières premières et d’énergie ne décroît pas, et l’extractivisme ne s’arrête plus aux frontières des pays « en voie de développement ». Connaître les réalités et les combats de ceux qui, de l’autre côté de l’Atlantique, refusent de supporter le coût du métabolisme de notre société nous pousse aussi à nous interroger sur notre propre rôle.

FAL  Magazine est une revue éditée par l’association France Amérique Latine. Toutes les informations et les sommaires des numéros parus, tarifs, abonnements, commandes : www.franceameriquelatine.org

Sommaire:

Révolte des sacrifiés au "développement". Par Anna Bednik

Se rencontrer, apprendre, construire et résister : expériences des assemblées socio-environnementales en Argentine. Entretien avec Mirta Antonelli

L'énergie pour quoi et pour qui ? Entretien avec le MAB (Mouvement des Affectés par les Barrages, Brésil)

Quatre tensions à affronter pour combattre l'extractivisme. Par Raúl Zibechi

En images. "Jetés dans les ordures" Chroniques de mort et de lutte. Par Agrupación Un salto de vida (Mexique)

Pérou. Les asperges assoiffées du désert. Par Elif Karakartal.


http://www.aldeah.org/fr/extractivisme