La résistance contre le projet minier Conga finira bientôt sa troisième année. Le même nombre d’années s’est écoulé depuis la blessure qui laissa Elmer Campos[i] paralysé pour le restant de ses jours. Le 3 juillet dernier, deux ans ce sont écoulés depuis que les cinq martyrs de la résistance furent assassinés. Les veuves et leurs familles vivent dans la pauvreté et pratiquement rien n’a été fait par les autorités pour les soutenir. De temps à autre, des particuliers ou une organisation essayent de faire bouger les choses, obtient parfois un petit résultat. De son côté, le gouvernement régional a employé quelques veuves pendant 8 mois en leur offrant un petit boulot. Jusqu'à ce jour il ne les a toujours pas payées, lui qui se vante de soutenir la lutte. Il a fallu qu’une assemblée de la Plateforma Interinstitucional Celendina rédige un document le menaçant de dénoncer les faits à la presse, rappelant l’engagement de la région et faisant pression, pour qu’il daigne les payer.
Les membres de la résistance sont montés des milliers de fois vers les lacs, des centaines d’assemblées ont été tenues. Ici et à l'étranger, des milliers de tracts et de pamphlets ont été distribués, des milliers d’articles, des livres ont été publiés, des conférences[ii] ont été tenues, des manifestations ont été organisées. Des centaines de personnes venues de l’étranger se sont déplacées vers Cajamarca. Certains ont tiré profit de ces publications pour se faire un nom et se faire passer pour des « grands acteurs » de la résistance alors que l'on ne les voit que dans les grandes conférences à Lima et pour les photos d’anniversaire…
Mais rien, toujours rien. Rien n’aura encore permis d’annuler le projet Conga.
Bien au contraire, le nombre d’organisations locales qui « luttent » s’est multiplié exponentiellement et des divisions dans le « mouvement social » sont apparues. Mouvement social entre guillemets car aujourd’hui il en faut peu pour se voir être intégré dans le “mouvement social”, et cela, sans qu’aucune mesure de sécurité soit prise pour vérifier la validité de ses intentions. C’est ainsi qu’une ribambelle d’étudiants, la plupart étrangers, viennent « étudier » le mouvement sans qu’on sache vraiment ce qu’ils font du matériel écrit et audiovisuel qu’ils remportent chez eux, (ou le matériel se perd-t-il en chemin quelque part?). Bien évidemment, il ne faut mettre tout le monde dans le même panier. Il y a les vrais étudiants, ceux qui une fois rentrés, vont continuer de soutenir notre lutte, voire même s’engager dans un mouvement de résistance chez eux (voir exposition de photos des lacs de Conga à Paris début 2013 ou les différents articles de presse publiés).