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Tia Maria : Vivre, ou mourir

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Date de publication: 
Mardi, 28 Avril, 2015
Par: 
RaquelN

Tia Maria[1] : Vivre, ou mourir

Après les discussions - initiées le 20 mars entre organisations, fronts de défense, population et représentants du gouvernement[2] - celles-ci n'ayant pas aboutit, les habitants de la vallée de El Tambo ont poursuivit leur grève. Le 15 avril, Jesús Cornejo, président de l’association des utilisateurs de l’eau (Junta de usuarios del valle del Tambo), a été arrêté, puis relâché quelques jours après faute de preuves ; cependant, les investigations à son encontre se poursuivront[3].

En effet, après le rejet, par le ministère de l'Énergie et des Mines (Minem), de la première étude d'impact environnemental (EIE) de 2009, en raison des 136 observations de l'UNOPS[4] ; les porteurs du projet, désirant évidemment l’imposer, ont présenté une seconde étude d'impact environnemental (EIE) en avril 2015, qui, malgré les fortes critiques, a été est très rapidement approuvée. Cette seconde EIE devait « lever les observations de l’UNOPS » et donc, particulièrement démontrer que le projet ne polluera pas les sources d'eau et que les résidus des explosions n'affecteront pas la vallée. Cette nouvelle EIE affirme donc que l'eau souterraine ne sera pas affectée, puisque le projet utilisera de l’eau de mer dessalée et que, de plus,  l’eau consommée par la vallée provient des Andes ; mais aussi que les particules issues des explosions n’atteindront pas la vallée, puisque ces dernières auront lieu en journée, moment où le vent ne tourne pas en direction de la vallée»[5]. Espérons que le vent sache lire les EIE et tournera du côté qui est écrit ! En prime, le gouvernement rejette toute consultation préalable « puisque nous ne sommes pas face à des populations indigènes reconnues dans la base de données du Ministère de l’Inter-culturalité », ministère chargé d’identifier les populations indigènes[6]. Il n’y a, dans cette vallée, que des agriculteurs… donc on ne pose aucune question et on écrase.

La riche vallée de El Tambo produit surtout des oignons et des pommes de terre, pour une valeur estimée de 380 millions de dollars annuels, et est riche en pâturages. On y cultive aussi bananes, olives, maïs, ail, quinoa, canne à sucre. Oignons, ail et pommes de terre sont exportés vers les pays voisins et nourrissent la ville de Lima. De 40 à 50 mille agriculteurs travaillent ici. Cependant, « l’avantage comparatif »[7], l’un des piliers du néolibéralisme, a condamné le Pérou à être un producteur minier. Et les gouvernements successifs s’y soumettent puisqu’ils sont, tout simplement, d’accord. Celui de Ollanta Humala a vu dans cette politique son gagne-pain et le financement de sa (maigre) politique sociale. Les accords relatifs aux Traités de Libre Échange[8] - qui doivent garantir les investissements étrangers et rendre l’État responsable de l’accomplissement de ces accords - poussent le gouvernement à faire usage de la main de fer : le récemment nommé premier ministre, Pedro Cateriano, s’est rendu à Arequipa (chef lieu de la région concernée) et a annoncé que le projet passerait coûte que coûte. Aujourd’hui, 22 avril, la région s’est mobilisée et est en grève. Mais la police a contre-attaqué et tué l’agriculteur Victoriano Huayna Nina - 61 ans - qui est mort, vidé de son sang, après avoir reçu une balle dans la jambe. Pourtant, la population ne cèdera pas et n’arrêtera les protestions, que si et seulement si, le projet est annulé.

Les opposants, quels qu’ils soient, sont traités de terroristes. Défendre la vie, aujourd’hui, est synonyme de terrorisme. Mais, cette fois-ci, le gouvernement est face à une opposition beaucoup plus importante que celle contre le projet Conga[9], puisque quatre maires de la région prennent part à la lutte et défendent, très activement, leur vallée. De plus, la vallée n’est pas une zone vide d’activité agricole, bien au contraire, elle est très productive. La pollution des eaux et terres, par la mine, et surtout de l’air, par les particules issues des explosions minières (la fréquence des cancers du poumon continue à augmenter progressivement dans la région d’Arequipa[10]), va provoquer un désastre humain, écologique et économique laissant le pays aux mains du néolibéralisme, qui détruira aussi toute souveraineté alimentaire.

Lire un reportage complet sur le projet : http://servindi.org/actualidad/127691



 

[1] http://www.aldeah.org/fr/tia-maria-l-extractivisme-contre-attaque-0

[4] UNOPS : Bureau des Nations Unies pour les services d'appui aux projets (UNOPS). "L'UNOPS est un organe opérationnel des Nations Unies. Il aide ses partenaires à mettre en œuvre efficacement des projets humanitaires, de consolidation de la paix et de développement partout au monde.". Ici, dans la vallée de l'El Tambo, l'UNOPS est particulièrement chargé, en vertu de sa signature d'un accord avec le ministère de l'Énergie et des Mines (Minem) en novembre 2010, d'examiner les différentes études d'impact environnemental du projet Tia Maria.

[7] Des Principes de l'économie politique et de l'impôt, David Ricardo.

[8] Acuerdo de Integración Comercial entre los Estados Unidos Mexicanos y la República del Perú http://www.ina.com.mx/documentos/comercio_exterior/acuerdos_comerciales/TLC%20Peru.pdf

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